Notions de bases
Il faut d'abord faire la distinction entre l'élection d'un candidat à un poste électif (président, juges) et l'élection d'une chambre des représentants du peuple. Le premier est un système électif à lauréat unique le second à lauréats multiples. Dans le premier cas, puisqu'il ne peut y avoir qu'un élu par poste, il est nécessaire de mettre en place un mode de scrutin qui fait ressortir le candidat le plus populaire, au détriment des autres candidats en lisse. Il existe toute une panoplie de modes de scrutin conçu pour ce type d'élection : mode de scrutin pluralitaire uninominal à un tour, à deux tours, préférentiel, par assentiment, méthode de Borda etc. Par contre, dans le cas système électif à lauréats multiples, il ne s'agit pas de faire ressortir le candidat le plus populaire, mais bien de donner une juste représentation à toute une population. Il existe deux sous catégories de scrutin pour les lauréats multiples : les systèmes semi-proportionnels et proportionnels. Le terme proportionnel signifie dans ce contexte que l'on vise à donner une juste représentation des préférences des électeurs. Il n'y a pas de perdant et de gagnant, il y a sélection des lauréats en fonction de la proportion de votes reçus.
Critères d'un système politque démocratique
La vraie proportionnelle
À deux reprises en moins de 20 ans, des consultations publiques ont fait ressortir que le mode de scrutin le plus approprié à la réalité québécoise était le scrutin proportionnel régional. Avec un scrutin proportionnel, les citoyens québécois éliraient, pour la première fois, une députation véritablement représentative de la pluralité des opinions politiques qui existe dans notre société.
Parce que le PQ est un parti politique social-démocrate, il est par définition inapte à être l'unique véhicule d'une cause populaire qui reçoit l'appui de millions de citoyens dont les opinions politiques sont diverses et très souvent en opposition les unes par rapport aux autres. L'apparition d'un grand parti politique indépendantiste vers la fin des années 60 nous a été imposé par le présent mode de scrutin. Le scrutin que nous a légué l'Empire britannique crée une distorsion énorme entre le vote réel et la distribution des sièges à l'Assemblée nationale. Ce scrutin a été maintenu en place au fils du temps parce qu'il est le plus suceptible de contourner la volonté populaire, parce qu'il a été choisi expressément pour favoriser l'élection d'un gouvernement de parti unique, loyal à l'Empire et capable de passer toutes les lois qu'il désire sans aucune opposition politique.
Depuis les années 60 donc, nous nous sommes habitués à croire qu'il est absolument essentiel de ne pas diviser le vote des indépendantistes pour atteindre notre objectif. Cette logique sera effetivement incontournable tant que nous resterons prisonnier du mode de scrutin que quelques impérialistes britanniques d'un age révolu nous ont légués. Mais voilà, cette réalité n'est pas immuable. Nous avons le pouvoir de la changer depuis très longtemps. Nous avons aujourd'hui le devoir moral de régler cette question une fois pour toute.
En nous donnant un mode de scrutin véritablement proportionnel, nous changerions complètement les règles du jeux à l'Assemblée nationale. Il deviendrait par exemple en toute probabilité impossible pour un seul parti politique d'obtenir la majorité des sièges, parce que dans la réalité aucune idéologie n'est capable d'obtenir la majorité des voix à elle seule, sauf lorsque la liberté d'expression est bafouée ou carrément violée. Un parti qui a 40% de votes mérite 40% de sièges. C'est vrai aujourd'hui et c'était vrai hier. Tous les démocrates québécois doivent s'entendre là-dessus une fois pour toute. Ce mode de scrutin mérite d'être abandonné parce que nous savons qu'ils en existent de bien meilleurs.
Lorsqu'ils songent cette éventualité, beaucoup de souverainistes imaginent un scénario catastrophe : le PQ, n'ayant pas la majorité des sièges, se voit obligé de partager le pouvoir avec les libéraux! Ceci serait en effet plutôt dramatique, mais c'est une erreur de penser comme cela. Avec un mode de scrutin proportionnel, le PLQ et le PQ ne seraient plus les deux seuls joueurs de taille dans l'arène politique. Ils seraient très nombreux parmi nos concitoyens à voter pour les tiers partis qui, avec une redistribution des sièges équitable, auraient une réelle chance de faire élire des députés. Donc, un scrutin proportionnel nous forcerait, nous citoyens indépendantistes, à nous organiser en coalition permanante pour atteindre le pouvoir. Notre mouvement n'aurait pas plus ni moins d'appuis, mais il serait à l'abris des luttes entre les forces de gauche et de droite.
Ceci ne rendrait pas le Parti Québécois, un parti social-démocrate crédible, moins nécessaire qu'avant. En effet, avec un scrutin proportionnel, ce serait la formation politique ayant obtenu le plus grand nombre de vote qui serait appelé à former le gouvernement de coalition. Il serait donc indispensable que nous ayons un parti politique de centre-gauche capable d'obtenir plus de vote que le PLQ. Le PQ serait un élément essentiel permettant la victoire d'une grande coalition de partis politiques favorables à l'indépendance. Cette coalition serait capable d'obtenir une majorité des sièges seulement en obtenant l'appui de la majorité de la population. Avec notre présent mode de scrutin, l'obtention d'une majorité des voix et une majorité des sièges n'est à la porté d'aucun parti politique. Voyez à ce sujet la loi Duverger.
Pour que la coalition fonctionne bien, il faudrait que le plan d'action des indépendantistes soit connu des électeurs, idéalement en faisant de l'organisation d'une assemblée constituante un projet commun à tous les partis indépendantistes. Dans ce cadre, on pourrait, en toute légitimité, envisager une élection référendaire. Aux lendemains de l'élection d'une coalition indépendantiste majoritaire dans les suffrages et majoritaire en chambre, nous serions en droit de parler au nom de la majorité des Québécois. Nous ne pourrions pas être en meilleure position de force sur le plan politique.
S'il advenait par malheur que le Parti libéral du Québec soit élu, la question de l'indépendance serait tout simplement mise en veilleuse pendant 4 ans, ce qui ne serait en soi rien de nouveau. La bonne nouvelle c'est qu'un gouvernement de coalition libérale ne serait pas en mesure d'agir de façon unilatérale. Il lui serait totalement impossible de bâillonner l'Assemblée nationale comme il l'a fait récemment par exemple.
Donner la possibilité à nos citoyens de voter librement selon leur conscience ferait avancer le Québec d'un pas de géant sur le plan démocratique. Un tel changement pourrait entre autre contribuer à stimuler l'intérêt de la population pour la chose publique, donc par le fait même pour la question de l'indépendance qui est au coeur de tous nos débats depuis au moins les années soixante. Une coalition des partis de centre-droit, centre-gauche et de la gauche progressiste serait beaucoup plus susceptible d'accaparer la majorité des voix qu'un parti politique se prétendant le porte parole de tout le monde avec un discours qui sonne faux, qui est contradictoire, et qui se fait en plus des ennemis parmi les plus militants du mouvement indépendantiste.
Pour entrevoir les possibilités qu'offriraient un mode de scrutin proportionnel nous pouvons déjà nous référer à ce qui se fait depuis des années voir des décennies dans plusieurs pays d'Europe. Pour comprendre la question de la proportionnalité dans la redistribution des sièges, consultez nos liens dans le menu de droite.